Powell & Pressburger
En 1947, Michael Powell & Emeric Pressburger signent et réalisent l'adaptation d'un roman pour le drame Black Narcissus. Un an plus tôt, ils écrivaient et réalisaient une comédie, A matter of life and death. Deux bons films dans des genres très différents.
Black Narcissus : Sur ordre de la mère supérieure, cinq religieuses quittent leur couvent de Calcutta pour l'Himalaya, où un endroit est mis à leur disposition pour créer une école et un dispensaire, là même où auparavant des moines avaient échoués. La soeur supérieur de cette mission est jeune, et elle devra faire face au vent continuel, au peuple enraciné, à Mr Dean, son contact sur place très pragmatique, aux doutes des soeurs qui l'accompagnent et à ses propres démons. Le pays est une épreuve, et le vernis craque jusqu'à la folie d'une des soeurs… Visuellement très réussi, le film s'achemine posément vers son dénouement dramatique, dans lequel se trouvent les meilleurs scènes (le film vaut la peine ne serait-ce que pour quelques plans de soeur Rose). Les montagnes immuables et les vents incessants restent inchangés là où les étrangers repartent transformés ; simple et sans surprises mais bon et digne d'intérêt.
A matter of life and death : en 1945, le pilote anglais Peter Carter reste seul à bord de son avion en flamme, au milieu du fog anglais, l'équipage ayant sauté sous ses ordres. Sans parachute, il fait un dernier dialogue radio avec une américaine, lui expliquant qu'il va sauter et qu'il n'a pas de parachute, préférant cela aux flammes. Étrangement, il se réveille sur la plage, sur terre, en vie, et retrouve l'américaine, avec qui le coup de foudre présagé durant leur dialogue se produit… Seulement voilà, les instances divines s'aperçoivent qu'elles ont fait - une fois n'est pas coutume - une erreur, et qu'il aurait bien du mourir. L'émissaire du paradis (un français décapité) tombe sur un os : Peter ne veut pas le suivre, et estime que puisqu'il est tombé amoureux depuis sa non-mort, il ne doit pas être floué. Il va donc falloir un tribunal divin pour juger de la question. Que tout se passe dans sa tête félée lors de la chute ou bien qu'il comparaisse vraiment au paradis, le fait est qu'il doit gagner son procés : prouver que leur amour qui a sourdu* (* oui, si je veux utiliser le verbe sourdre, je l'utilise, m'embêtez pas.) en moins d'une journée est un Vrai Amour qui justifie sa survie. Et accessoirement que les relations américano-britannique ne sont pas une clause rédibitoire (oui, celui de chargé de l'accusation a gardé une dent éternelle contre les anglais, et voit d'un très mauvais oeil cette liaison).
On a là une romance complétement réussie, subtile & grandiloquente à la fois, qui prends son ton dés la scène d'ouverture, un zoom depuis l'univers, avec une voix off, pour nous amener à bord de l'avion en perdition… Le film ne laisse jamais le temps de s'ennuyer, entre le paradis bureaucratique et le très anglais David Niven, entre l'émissaire français à l'accent à couper au couteau et le délire d'accuser l'Angleterre entière pour accuser le pilote (si cela est bien vrai, le film est une commande du ministère de la défense dans l'optique de montrer que les US/UK devaient se serrer les coudes - ce qui aurait pu sombrer dans la propagande mais contribue parfaitement à la comédie).
On peut rapprocher A matter of life and death de Heaven can wait (je parle de celui de Warren Beatty, je n'ai pas encore vu celui de même nom d'Ernst Lubitsch), mais la comparaison ne tiens pas longtemps (pour moi en tout cas), car l'histoire du Quaterback qui n'aurait pas du mourir et qui se retrouve à choisir un corps d'emprunt pour continuer à vivre semble fade (bien que ce soit un film très correct) devant l'autre, plus emporté, plus marquant…
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